Lors du Tokyo Forum 2025, Choi Tae‑won, président du groupe SK, a appelé à repenser le capitalisme en intégrant la mesure et la gestion de la « valeur sociale ». Selon lui, l'intelligence artificielle et les technologies numériques pourraient permettre de quantifier des contributions qui échappent aux seuls indicateurs financiers et d'orienter ainsi les décisions d'investissement et les incitations.

Contexte : pourquoi questionner le modèle dominant

Choi Tae‑won a souligné que les enjeux contemporains (dégradation environnementale, creusement des inégalités, tensions sociales) rendent insuffisant un système qui ne récompense que la performance financière. Il définit la valeur sociale comme le supplément d'utilité qui dépasse le profit économique : création d'emplois, contributions aux collectivités, réduction des impacts environnementaux et amélioration du bien‑être des parties prenantes.

Ce positionnement s'inscrit dans un débat plus large sur la responsabilité des entreprises et le rôle des États et de la société civile pour réorienter ressources et comportements. Le Tokyo Forum, organisé conjointement par le groupe lié à la fondation Choi et l'université de Tokyo, a réuni universitaires et dirigeants pour débattre de ces thèmes.

Mesurer l'invisible : promesse et obstacles

Un élément central du propos de Choi porte sur la difficulté historique d'évaluer la valeur sociale. Il rappelle que les coûts de transaction, le manque de données et l'absence d'outils standardisés ont freiné l'allocation optimale des ressources vers des activités socialement utiles. Dans ce contexte, il avance que les technologies numériques et l'intelligence artificielle offrent des instruments potentiellement robustes pour quantifier, suivre et piloter ces impacts.

Concrètement, la promesse technologique se décline en plusieurs capacités : collecte et traitement de grandes masses de données, détection de corrélations entre actions et effets sociaux ou environnementaux, et production d'indicateurs périodiques permettant un suivi. Ces possibilités restent toutefois dépendantes de la qualité des données, des méthodes d'évaluation retenues et de la transparence des modèles employés.

Une pratique d'entreprise : l'exemple du groupe SK

Pour illustrer son propos, Choi a présenté l'expérience du groupe SK. Il a expliqué que chaque filiale évalue désormais des postes positifs et négatifs (emploi, fiscalité, environnement, solidarité) et les intègre dans les décisions d'investissement et les critères de performance. L'objectif annoncé dépasse la simple neutralité : il s'agit d'améliorer la valeur sociale d'année en année.

Ce basculement se traduit, selon lui, par une transformation des indicateurs clés de performance (indicateurs clés de performance — KPI) : la performance financière ne suffit plus, et les entreprises visent à ne pas détériorer la valeur sociale, puis à l'accroître. Choi a également pris part à une table ronde sur le « capitalisme collaboratif », où il a débattu avec des universitaires et dirigeants japonais et coréens des modalités d'une coopération entre entreprises, États et société civile.

Enjeux pratiques et réglementaires

Si la quantification de la valeur sociale via l'intelligence artificielle paraît séduisante, plusieurs enjeux restent à adresser pour qu'elle produise des effets concrets :

  • Définition et normalisation : comment définir des métriques comparables entre secteurs et territoires ?
  • Transparence et gouvernance des modèles : qui construit les algorithmes et selon quelles hypothèses ?
  • Risque de manipulation : comment éviter le « greenwashing » ou des mesures biaisées en faveur des intérêts privés ?
  • Cadre réglementaire : quels cadres publics seront nécessaires pour encadrer l'usage des données et des évaluations ?

La réussite de cette ambition dépendra autant de l'évolution technologique que de processus institutionnels capables d'assurer fiabilité, comparabilité et responsabilité.

Ce qui reste à confirmer

Les éléments présentés lors du forum reflètent la vision et les pratiques du groupe SK, ainsi que la position de Choi Tae‑won sur le rôle de l'IA. Il reste à confirmer, à plus large échelle, dans quelle mesure ces approches sont reproductibles, quelles méthodes d'évaluation seront adoptées par d'autres acteurs et comment seront traitées les questions de gouvernance des données et d'équité dans l'allocation des ressources.

À retenir

  • Choi Tae‑won appelle à un « nouveau capitalisme » intégrant la mesure de la valeur sociale au‑delà des seuls résultats financiers.
  • Il estime que l'intelligence artificielle et les technologies numériques offrent des outils pour quantifier et piloter ces valeurs, malgré des limites liées aux données et aux coûts de transaction.
  • Le groupe SK applique déjà des évaluations de la valeur sociale au niveau des filiales, couvrant emploi, fiscalité, environnement et contributions locales.
  • L'usage de l'IA pour mesurer la valeur sociale pose des enjeux de normalisation, de transparence et de gouvernance qui devront être traités par les entreprises et les autorités publiques.

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